Décembre a cette odeur particulière : un mélange de vin chaud, de coffrets de Noël qu’on prépare les uns après les autres, et de savons doux qui sèchent patiemment sur les étagères. C’est sans doute le mois qui me demande le plus d’énergie, celui où je voudrais que les journées fassent 37 heures.
Parce que, même si tout le monde pense que décembre = derniers marchés, pour moi c’est aussi la période où je dois produire non seulement pour les fêtes, mais aussi pour toutes les commandes de janvier.
Un savon demande du temps, de la patience, du séchage.
Et la fabrication, elle, n’attend jamais.
Alors mes journées débordent.
Je commence souvent tôt, je finis tard… tellement tard qu’il est 23h00 pendant que j’écris ces lignes, encore devant mon ordinateur, à moitié dans ma to-do, à moitié dans mon journal.
Je me dis chaque année que ce n’est pas très raisonnable, mais c’est aussi ça, la vie derrière la savonnerie : un rythme qui s’emballe, un quotidien intense, et un amour du travail bien fait qui me pousse à continuer.
Et puis il y a les marchés.
Ces moments où je sors enfin de mon atelier.
Les marchés, c’est le contraste total : le froid qui pique, les mains gelées, la fatigue qui s’accumule…
Mais c’est aussi ce qui me donne le plus de force.
Parce que c’est là que je vois les consommateurs en vrai !
Ceux qui me disent qu’ils attendent mes savons tous les ans.
Ceux qui reconnaissent l’odeur avant même d’arriver au stand.
Ceux qui racontent qu’ils ont découvert un de mes savons grâce à un cadeau, et qui reviennent pour en choisir un autre.
C’est là que je comprends pourquoi je fais tout ça : parce que ce que je fabrique dans mon coin, seule, devient un objet qui accompagne des vies.
Décembre, c’est dur.
Ça tire dans le dos, dans les épaules, dans le moral parfois.
On pourrait croire que je ne fais “que” du savon… Mais derrière, il y a de la gestion, de l’administratif, de la logistique, des nuits trop courtes, des marchés sous la pluie, et des cafés froids.
Et pourtant, c’est aussi un mois où je me sens vivante, connectée, utile, à ma place.
Alors voilà, entrée du soir, écrite tard, dans un mélange de fatigue et de gratitude.
Demain matin, l’atelier m’attend — et les clients aussi.
Et finalement, c’est ce grand écart-là qui fait la beauté de mon métier.


